Davos (Suisse) : « La croissance ne résoudra pas seule, la question du chômage » 

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  • Comment créer une croissance plus inclusive, qui profite à tous ?

Tunisie-Tribune (Croissance)  – La question est au cœur des débats du forum économique mondial qui se tient à Davos (Suisse) jusqu’au 26 janvier  2018. Pour Alain Roumilhac, président de Manpower France, la clé du succès tient à la formation, initiale et permanente, des individus.

  • Les participants de la 48e édition du Forum économique de Davos se partagent entre optimistes qui se réjouissent de la reprise de la croissance et les pessimistes qui pointent les risques et les défis persistants. Avez-vous choisi votre camp ?

Alain Roumilhac : « Je choisis les deux. L’évolution de la conjoncture invite indubitablement à l’optimisme. Après la crise financière de 2008 et les années de récession qui ont suivi, la croissance est de retour et la confiance se réinstalle. »

Mais des menaces continuent de peser sur le monde et, surtout, cette croissance n’est pas assez inclusive, autrement dit pas assez partagée par tous. Si bien que le risque est grand de voir augmenter le nombre de gens laissés au bord de la route.

Dans ce paysage contrasté, la France ne s’en tire pas si mal. J’étais à Versailles, le 22 janvier dernier, pour la rencontre « Choose France » organisée par l’Élysée avec 140 grands patrons internationaux. J’ai pu constater combien l’image de la France avait changé en peu de temps. Grâce aux réformes engagées sous la présidence d’Emmanuel Macron, notre pays est plus que jamais perçu comme une terre d’opportunité. Or, la confiance, c’est fondamental en économie.

  • La France connaît un mieux économique, mais le chômage reste haut. Quel est le problème ?

A. R. : Le problème principal est celui de l’adéquation des compétences avec les besoins. Chez Manpower France, nous constatons tous les jours la difficulté qu’il y a à trouver les bons candidats que recherchent nos clients.

Cela s’explique par une déficience de notre système de formation. Plus de 100 000 jeunes sortent chaque année de l’éducation nationale sans aucun diplôme. C’est un vrai souci. La France a également pris beaucoup de retard dans le domaine de l’apprentissage qui représente pourtant une voie majeure d’intégration professionnelle. Enfin, depuis des années, l’attraction des métiers manuels diminue.

J’ajoute que tous les grands pays qui sont à 4 % ou 5 % de chômage sont ceux dont le salaire minimum est très inférieur au nôtre. On peut dire que c’est un choix de modèle social, mais il faut en assumer les conséquences.

Assurance-chômage, de nouvelles règles déjà en sursis

Tout cela créé un environnement peu propice qui laisse penser que la croissance à elle seule ne réglera pas la question du chômage. Il faut accompagner la dynamique économique par des dispositifs de formation adéquats. Les réformes sont en cours avec le plan d’investissement formation, la réforme de l’apprentissage et celle de la formation professionnelle. Il faudra attendre la fin du quinquennat pour en connaître le résultat.

  • À Davos, il est beaucoup question de la révolution technologique – du numérique et de la robotisation – qui bouleverse nos organisations. Est-ce la fin annoncée du travail ?

A. R. : L’histoire est pleine de ces révolutions technologiques qui ont bouleversé nos modes de production et de vie et, à chaque fois, le monde s’est adapté. C’est ce que les économistes appellent la « destruction créatrice », ce processus continuellement à l’œuvre dans nos économies qui veut que, sous l’effet de l’innovation, certains secteurs disparaissent quand apparaissent de nouvelles activités.

Bien sûr que le numérique et la robotisation contribuent à détruire des emplois. Mais ces technologies sont aussi sources d’opportunités pour ceux qui savent s’adapter. C’est la grande question de la flexibilité des travailleurs dans un monde du travail en perpétuelle mutation. La clé pour affronter l’avenir, c’est la formation, initiale et permanente. C’est le grand sujet posé aux politiques, aux entreprises et aux individus pour les cinquante prochaines années.

Recueillis par Antoine d’Abbundo

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