Classement de Davos : La Tunisie stagne en compétitivité

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Tunisie-Tribune (Davos ) – Occupant le 87e rang sur 141 pays, la Tunisie stagne dans le classement annuel de compétitivité du Forum économique mondial (WEF) 2019-2020. Ce rapport, ayant une grande audience internationale, considère que « les pays qui ont investi dans le capital humain, l’amélioration des institutions, le dynamisme des affaires ou encore la capacité d’innovation, seront mieux placés pour relancer une croissance de la production inexistante ou peu élevée ».

La course à la compétitivité des économies, facteur d’attractivité et de sortie de crise de premier plan, n’est pas encore favorable à la Tunisie, malgré tous les efforts déployés durant les dernières années aux fins d’amélioration du climat des affaires et de promotion du cadre d’investissement.

La nouvelle est taraudante et laisse s’interroger sur la capacité de résilience, voire de rebond de l’économie nationale vu que le pays mise plus que jamais sur l’investissement pour sortir de l’ornière et emprunter la voie de la transition économique.

Le nouveau classement de Davos met la Tunisie immédiatement derrière les 86 économies les plus compétitives du monde, trop loin après le top 5, en l’occurrence Singapour, les États-Unis, Hong Kong, les Pays-Bas et la Suisse, et juste en arrière par rapport aux 8 pays de la région du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord.

Force est de souligner, tout de même, que la Tunisie est parvenue cette année à améliorer son indice de compétitivité mondiale de 0,8 point, pour atteindre un score de 56,4 contre 55,6 en 2018. Ce qui est positif en soi. La réalité est que la compétition entre les pays est rude et que chacun bataille pour le fait d’avoir sa « place au soleil ».

Au-delà des insuffisances méthodologiques, le rapport sur la compétitivité mondiale demeure une référence de la perception de la communauté mondiale des affaires sur la réalité des économies et leur capacité à concurrencer et surtout l’étendue de leur création d’idées, culture entrepreneuriale, ouverture et agilité.

Du coup, la Tunisie est appelée à corriger ses points faibles et bâtir sur ses avantages pour consolider son positionnement compétitif et progresser en termes de performance globale.

Pourquoi la Tunisie fait du surplace ?

La compétitivité, c’est surtout « entreprendre et faciliter les entreprises dans leur essor ».  Sur ce point, la Tunisie s’affiche comme un « mauvais élève » d’après le classement de Davos surtout en matière d’efficacité du marché de travail (133e rang), de stabilité macroéconomique (124e rang), de système financier (74e place), de capacité d’innovation (92e place), de taille du marché des produits (92e rang), de qualité de l’infrastructure (85e rang) et d’éducation et de compétences (84e place).

En cause, la flexibilité des marchés n’est pas encore au rendez-vous au regard des meilleures pratiques internationales et des meilleures performances. La logique d’analyse du WEF estime si strict le fonctionnement des marchés sur fond de règles d’embauche, de licenciement, d’accès au financement, d’innovation, etc.

La Tunisie est pénalisée, par ailleurs, par l’état des équilibres macroéconomiques et l’incapacité du pays à rétablir les fondamentaux de l’économie, notamment en ce qui concerne la dynamique de la dette.

Selon beaucoup d’experts, ces résultats sont inquiétants. La performance compétitive de la Tunisie au titre d’un ensemble de 103 indicateurs, est mise à mal à cause de la détérioration de 60 indicateurs et la stagnation de 9 autres indicateurs. Les 29 indicateurs ayant enregistré une évolution par rapport au classement du rapport précédent, dont certains constituent des atouts et avantages non négligeables n’ont pas pour autant permis de compenser les mauvais résultats qui ont épinglé le classement du pays.

Force est de souligner dans ce sillon, que la Tunisie fait mieux que beaucoup de pays dans le domaine de la santé. Étant classée 49e à l’échelle mondiale, le pays est parvenu à tirer son épingle du jeu au niveau des ressources humaines, bien qu’étant soit mal placé sur le front de l’éducation et des compétences.

La nature changeante de la compétitivité économique dans un monde de plus en plus radicalement transformé par les nouvelles technologies numériques et l’intelligence artificielle sous la révolution 4.0 qui est à l’origine des différences de positionnement compétitif à l’échelle planétaire, ne cesse de poser des défis de taille aussi bien pour le gouvernement que pour les entreprises nationales.

Selon l’approche du WEF, la compétitivité est une notion multidimensionnelle, structurelle et repose sur le concept de « performe globale ». La priorisation des ajustements et des réformes à mettre en œuvre pour gagner le pari de la compétitivité est néanmoins de mise pour un pays comme la Tunisie qui fait face à un ensemble de défis et contraintes en même temps.

Fondamentalement, il faut résorber le déficit courant

Indépendamment des approches de mesure de la compétitivité, économiquement parlant et au sens strict du terme, la compétitivité représente la capacité d’une entreprise, d’un secteur ou d’une économie à faire face à la concurrence étrangère tant sur le marché local que sur le marché international. La part de marché est la principale mesure de la compétitivité prix et hors prix.
Pour apprécier la compétitivité d’une économie, la balance courante constitue ainsi le premier indicateur, car elle mesure le solde des flux d’échanges de biens et services et les transferts de revenus entre le pays et le reste du monde.

Sur cette base, la détérioration du déficit courant de la Tunisie durant les dernières années pour atteindre près de 10% du produit intérieur brut doit être le trait caractéristique fondamental de la faiblesse, voire le recul de la compétitivité du pays.  Autrement dit, l’ampleur du déficit des échanges commerciaux entre la Tunisie et le reste du monde, source essentielle du déficit de la banque des paiements courants, reflète à quel point l’économie du pays est dans l’incapacité de maintenir, voire accroître ses parts de marché sur les marchés traditionnels et nouveaux.

Les pertes accusées par la Compagnie des Phosphates de Gafsa (CPG) sur les marchés extérieurs sont fortement éloquentes à ce titre. Sans compter la faiblesse de la dynamique des autres secteurs clés à l’exportation.

La dépréciation de la valeur du dinar, censée être motrice des exportations tunisiennes, s’est avérée inopérante et n’a pas produit les effets escomptés en termes de compétitivité.

Ceci pour dire à quel point la résorption du déficit de la balance commerciale de la Tunisie mettant en relation son appareil de production découpé en secteurs, branches ou entreprises et les performances de l’extérieur, est une nécessité impérieuse. Au-delà de l’impératif de développer la spécialisation sectorielle et géographique de la Tunisie, il va falloir solutionner les facteurs de blocage actuels avant tout.

Parce que la transformation structurelle de l’économie en faveur des produits à forte valeur ajoutée, doublement compétitifs en prix et hors prix, ainsi que l’orientation vers de nouveaux marchés prometteurs en Afrique et dans les autres régions du monde, tiennent à des considérations de réformes structurelles et se font sentir à long terme.

Pragmatisme oblige, des actions de court terme « Quick Win », nécessitant certes des solutions d’ordre institutionnel, sont plus que nécessaires et permettraient de réduire le déficit commercial en regagnant les parts de marché traditionnelles pour le mois.

La reprise de l’activité des phosphates, l’aménagement du climat social dans des entreprises exportatrices et l’amélioration de l’environnement des affaires en général, moyennant une stabilité politique et sociale pérenne susceptible de donner la visibilité aux investisseurs locaux et étrangers, sont des conditions sine qua non au rétablissement de la compétitivité du pays et, par ricochet, à la reprise des exportations et l’attrait de nouveaux investisseurs étrangers productifs, facteurs d’ajustement certains du taux de couverture et du solde commercial du pays.

Avant de parler des facteurs de performance globale, les nouveaux gouvernants du pays sont appelés à résorber un nombre de contraintes institutionnelles pour gagner en compétitivité, en attendant les effets à moyen et long termes des politiques publiques déjà engagées et la mise en œuvre aux fins de positionnement compétitif honorable.

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