Il n’y aura plus de prison pour les chèques sans provision … Une mesure des plus populaires

0

Tunisie-Tribune (chèques sans provision) – En plus de la suppression des peines de prison préconisée par le nouvel article 411, une amnistie fiscale est une hypothèse à ne pas écarter.

Lors de l’audience qu’il a accordée, le 12 février dernier, au président du Conseil bancaire et financier, Neji Ghandri, le Chef de l’Etat a souligné «la nécessité pour les banques de partager une partie de la responsabilité concernant l’émission des chèques».

16 jours après, soit le 28 février, il reçoit de la ministre de la Justice la version finale du «projet d’amendement de l’article 411 du Code de commerce» qui, outre son caractère dépénalisant, vise à renforcer les devoirs de la banque, à employer des mécanismes de paiement et des solutions électroniques alternatives et à mettre en place un système permettant de régler la situation des contrevenants contre lesquels des jugements définitifs ont été rendus, ou qui font l’objet de poursuites judiciaires en cours pour émission de chèques sans provision, l’objectif ultime étant de préserver la liberté du débiteur et les droits du créancier.

Après le Palais de Carthage, les regards sont maintenant braqués sur celui du Bardo où ce projet devra être examiné et, très probablement, adopté par l’ARP. Mais on peut d’ ores et déjà avancer que le… miracle (et c’en est un vraiment) s’est enfin produit: un chèque en bois n’envoie plus automatiquement en prison. Alléluia !

C’est là en tout cas une première dans l’histoire du pays à marquer d’une pierre blanche.

D comme délivrance

Bien évidemment, grâce à ce joli cadeau qui leur est tombé du ciel, les Tunisiens ne peuvent qu’être comblés de bonheur. En effet, il nous a été donné de constater que la réaction est chargée de satisfaction, de soulagement et, pour certains, d’allégresse. La délivrance avec un grand D. «Personnellement, pourquoi le cacher, j’ai sauté de joie dès que la bonne nouvelle m’est parvenue», jubile Abderrazek Amri, entrepreneur en électricité qui évoque «un enfer tout en geôles noires qui nous étouffait tous les jours jusqu’à l’étranglement». Bien qu’il jure qu’il est très prudent en matière de gestion financière, M. Amri reconnaît qu’il a «disjoncté» à deux reprises en se retrouvant derrière les barreaux. «Croyez-moi, assure-t-il, dans les deux cas, ce n’était pas de ma faute, mais la responsabilité incombait à mon client qui a accusé un retard de six mois, au lieu d’un seul, avant de me payer». Jamel Abdeddaiem, propriétaire de trois établissements de vente de pièces détachées, a vécu la même mésaventure. «Mon client, se remémore-t-il, qui n’est autre qu’un organisme étatique d’ordinaire solvable, a mis presqu’un an pour régler sa facture, sans peut-être penser que j’ai émis des chèques en tenant compte de la régularisation  de cette facture dans les délais habituels de trois mois. Résultat :six mois de prison qui furent pour moi six ans d’interminables souffrances». Et M Abdeddaiem de pavoiser: «Je ne remercie jamais assez le Chef de l’Etat qui nous a ainsi redonné espoir et motivation».

Lotfi Mokni, autre homme d’affaires, est sur la même longueur d’onde. «Naturellement, avoue-t-il, je fais partie des millions de Tunisiens qui ont salué ce projet que je qualifie de révolutionnaire, dans la mesure où je trouve stupide et insensé de demander à quelqu’un de régulariser sa situation vis-à-vis de la loi, alors qu’il est en prison. Bref, je suis pour le nouveau projet». Pour Hamed Melliti, analyste et spécialiste en sciences juridiques, «Foncièrement, le nouvel article fera gagner de l’argent à l’Etat, quand on sait que chaque prisonnier lui coûte, selon une récente étude tunisienne, 35 dinars par jour».

Que de tragédies humaines !

Il ne faut pas se voiler la face :la défunte loi réglementant les dispositions relatives à l’émission de chèques sans provision (CSP) était implacable, impitoyable et frisait la répression. Au point que, pour un CSP de… cinquante dinars, les menottes sortaient plus rapidement qu’une Ferrari. Et l’on ne souciait guère des tragédies humaines qui en découlaient.. Oui, que de jeunes promoteurs ont vu leurs espoirs réduits à néant.. Que d’hommes d’affaires au paroxysme de leur puissance ont fait faillite.. Que de familles se sont effondrées et disloquées. Que de milliers de postes d’emploi se sont évaporés pour condamner leurs occupants à aller grossir la population en chômage.. «La cruauté du destin et l’angoisse des chèques sans provision étaient telles, se souvient M. Amri, qu’on a déploré, au cours des vingt dernières années, plusieurs cas de suicide dans nos rangs d’entrepreneurs en bâtiment». Et d’ajouter : «Je n’oublierai jamais le drame de mon homologue qui s’est jeté du 4e étage d’un immeuble qu’il construisait dans le cadre d’un appel d’offres le liant à un établissement étatique. Il s’est suicidé, ce jour-là, après avoir perdu ses ultimes chances de régler 120 mille dinars de chèques impayés. Tel est aussi le cas d’un autre entrepreneur de renom qui, cribble’ de dettes et ayant émis des chèques en bois dépassant les 350 mille dinars, n’avait plus qu’à fuir clandestinement le pays, via la frontière terrestre avec l’Algérie, avant d’aller se réfugier en France. Là où six ans de chômage et d’incertitudes sur son sort ont eu raison de sa patience et surtout de sa santé pour y finalement mourir dans la solitude et l’indifférence, loin de sa femme, de ses enfants et de sa mère qui, sous le choc, attrapa une attaque cardiaque meurtrière !».

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici