Coronavirus : l’immunité pourrait finalement durer « des années »

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Tunisie-Tribune (l’immunité) – La question de la durée de l’immunité dans la Covid-19 est primordiale pour espérer mieux comprendre l’évolution de la pandémie. Faible, elle ne permettra jamais d’arriver à une immunité collective. Si, en revanche, cette immunité dure des années, on peut espérer que le virus s’éteindra de lui-même faute de combattants. Malheureusement, les différentes études sur le sujet sont contradictoires. Car l’immunité est bien plus compliquée qu’une simple histoire d’anticorps.

Pas un seul jour ou presque sans que ne tombe une nouvelle étude sur la durée de l’immunité au coronavirus. Certaines plutôt rassurantes, mettant en avant un niveau d’anticorps significatif après plusieurs mois, d’autres alertant au contraire sur la faible durée de ces anticorps, notamment chez les personnes asymptomatiques ou ayant développé des formes peu sévères. Certains patients n’en développent même pas du tout ! Or, cette question est fondamentale si l’on veut entrevoir la fin de l’épidémie : si la durée de l’immunité est faible, il faut s’attendre à des vagues successives sans fin et à devoir multiplier les rappels de vaccin. Si, au contraire, elle dure des années, le virus disparaîtra lorsque suffisamment de personnes auront été immunisées.

Les anticorps : seulement une petite partie du tableau immunitaire

La majeure partie des études se focalisent sur les anticorps qui apportent la réponse la plus directe et la plus rapide pour combattre les virus. Sauf que le système immunitaire est bien plus complexe que cela et dispose d’autres moyens pour se protéger. Une large étude, encore non relue et publiée sur le serveur bioRxiv, suggère qu’en prenant en compte l’ensemble de la réponse immunitaire, nous pourrions être protégés du coronavirus pendant « des années », voire « des décennies ».

Évolution des différentes composantes de la réponse immunitaire près l’infection : anticorps IgA, IgB, IgG, lymphocytes T CD4 et CD8. © Jennifer Dan et al., bioXriv, 2020

Les chercheurs se sont penchés sur les quatre principales composantes de la réponse immunitaire, à savoir les anticorps, les lymphocytes B, ainsi que les lymphocytes T CD8+ et T CD4+. Les échantillons ont été prélevés chez 189 patients américains, âgés de 19 à 81 ans, la plupart présentant des symptômes légers. Non seulement les chercheurs ont noté une baisse relativement modeste des anticorps 6 à 8 mois après l’infection mais ils se sont aperçus que le nombre de cellules B était en hausse — une surprise non anticipée. Les cellules T ne montrent elles aussi qu’une légère et lente diminution, ce qui laisse espérer une persistance à long terme. « Cette étude est la première à tracer la réponse immunitaire de manière aussi détaillée », se félicitent les auteurs.

Lymphocytes B et T : une immunité au long cours

Ces résultats encourageants sont en ligne avec d’autres études. Il a ainsi été montré que des survivants de l’épidémie de Sras de 2003 ont encore des anticorps neutralisants 17 ans après. Une autre étude de l’université de Fribourg (Allemagne) montre que les patients atteints de Covid-19 développent une réponse immunitaire puissante par l’intermédiaire des lymphocytes T CD8+, capables d’éliminer les agents pathogènes même en l’absence d’anticorps.

Le coronavirus se diffusant relativement lentement dans l’organisme, il laisse le temps aux cellules immunitaires de s’organiser. © Kateryna_Kon, Adobe Stock

Contrairement à la réponse humorale produite par les anticorps neutralisants, l’immunité conférée par les cellules B et T n’est toutefois pas stérilisante, c’est-à-dire qu’elle n’empêche pas d’être à nouveau infecté. Mais elle est suffisante en théorie pour empêcher une forme grave de la maladie. Cette protection serait d’autant plus efficace, selon les auteurs de l’étude, que le Sars-CoV-2 se diffuse relativement lentement dans l’organisme, laissant le temps au mécanisme immunitaire de réagir. « Le coronavirus est arrêté suffisamment rapidement pour que non seulement vous ne ressentiez aucun symptôme mais pour que vous ne soyez pas infectieux », assure Alessandro Sette, chercheur à l’Institut d’immunologie de La Jolla et coauteur de l’étude.

Il n’est pas déraisonnable de penser que cette mémoire immunitaire dure des années, voire des dizaines d’années
L’avantage des cellules immunitaires par rapport aux anticorps, c’est qu’elles sont produites en grande quantité et ne déclinent pas trop au fil des ans. « Il n’y a aucun signe que les cellules mémoires puissent soudainement s’effondrer. Habituellement, on observe une lente décomposition au fil des ans », indique Akiko Iwasaki, immunologiste à l’université de Yale et interrogé par le New York Times. « Il n’est pas déraisonnable de penser que ces composants de la mémoire immunitaire durent des années, voire des dizaines d’années », confirme son collègue Deepta Bhattacharya, de l’université d’Arizona. On n’a toutefois pas encore réussi à déterminer quelle quantité d’anticorps ou de cellules immunitaires est nécessaire pour offrir une protection suffisante. Ce taux pourrait lui-même être très variable selon les individus. La réponse à la durée de l’immunité ne sera peut-être jamais tranchée.

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